Stimuler électriquement le cerveau pour traiter la maladie de Parkinson

Stimuler électriquement le cerveau pour traiter la maladie de Parkinson

Hier, 11 avril 2016, la journée fut dédiée à la maladie de Parkinson. Elle affecte principalement les personnes de plus de 60 ans, mais 10 % ont moins de 50 ans. La cause est inconnue mais l’hypothèse la plus plausible est une combinaison de facteurs génétiques et environnementaux prédisposant. A l’heure actuelle, la maladie de Parkinson n’est pas curable, mais la stimulation cérébrale profonde améliore le quotidien des patients parkinsoniens. Zoom sur cette thérapie.

Les neurones dopaminergiques : coupables !

La maladie de Parkinson est une affection neurodégénérative chronique, lentement évolutive, d’origine le plus souvent inconnue, qui débute 5 à 10 ans avant l’apparition des premiers symptômes cliniques. Ceux-ci apparaissent lorsqu’il y a une réduction d’environ de moitié des neurones dopaminergiques.

Le contrôle de la motricité repose sur un équilibre entre trois neurotransmetteurs : la dopamine, l’acétylcholine et le glutamate. On observe, avec la maladie de Parkinson, une dégénérescence de la zone cérébrale où est produite la dopamine : la substance noire. La conséquence directe en est la diminution de la production et du stockage de dopamine et, ainsi, la perturbation de l’équilibre entre les neurotransmetteurs du mouvement. [1]

La maladie de Parkinson est caractérisée par une triade motrice : l’akinésie, la raideur et le tremblement. L’akinésie est un symptôme complexe qui se caractérise par une lenteur des mouvements (bradykinésie), un retard à l’initiation, une diminution de leur amplitude (hypokinésie) et une difficulté à réaliser des mouvements alternatifs. La raideur est une tension excessive des muscles, créant des douleurs musculaires ou tendineuses et une sensation de rigidité. Le symptôme le plus connu est le tremblement mais ne touche pourtant que 64% des parkinsoniens.

Administration de dopamine chez les patients Parkinsoniens ?

La L-DOPA, précurseur de la dopamine, est administrée aux patients parkinsoniens sous forme de comprimés. Il est transformé en dopamine au sein du système nerveux central après passage de la barrière hématoencéphalique. Il s’avère très efficace pour corriger les symptômes cardinaux mais provoque à moyen terme des effets secondaires.

Après une « lune de miel » qui dure les premières années de traitement (environ 8 ans), les patients développent des complications secondaires au traitement substitutif (agonistes dopaminergiques et L-Dopa) à savoir des troubles cognitifs, tels que des troubles des impulsions (hypersexualité, addiction aux jeux d’argents, des comportements à risque, achats compulsifs) mais également des troubles moteurs : les dyskinésies qui sont des mouvements anormaux involontaires et incontrôlés, parasitant principalement le mouvement volontaire et pouvant apparaître au repos.

La stimulation du cerveau parkinsonien : non, ce n’est pas de la science-fiction !

Quand le traitement dopaminergique provoque des effets secondaires, la stimulation cérébrale profonde du noyau subthalamique a révolutionné la prise en charge des patients parkinsoniens puisque ce traitement est remarquablement efficace à la fois sur les symptômes et les complications secondaires au traitement. La stimulation cérébrale a été réalisée pour la première fois en 1993 en France. [2]

La chirurgie consiste en l’implantation bilatérale d’électrodes de stimulation profonde au sein du noyau subthalamique. Ces électrodes sont alors connectées par deux câbles sous-cutanés à un générateur électrique placé au niveau du thorax permettant d’appliquer un courant continu à haute fréquence.

100000000000027b0000016599b1e4c5.jpg © Luc Mallet/Jérôme Yelnik/Éric Bardinet (Inserm, CNRS-INRIA) – Représentation des électrodes de stimulation cérébrale profonde placées au niveau du noyau subthalamique.

Cette découverte a été rendue possible grâce aux nombreuses expériences menées chez le primate non-humain rendu parkinsonien. La lésion ou l’inactivation pharmacologique du noyau subthalamique chez le primate produit des mouvements anormaux controlatéraux violents appelé hémiballisme [3 et 4] suggérant que le noyau subthalamique agit comme un frein pour supprimer le mouvement en général. A l’état parkinsonien, le noyau subthalamique fonctionnerait trop, entraînant un « freinage » excessif et inapproprié des mouvements, avec au maximum un état de « blocage » ou « freezing ».

Grâce à la stimulation cérébrale profonde du noyau subthalamique, les symptômes moteurs [5], les dyskinésies, et le traitement LDOPA sont réduits à plus de 50%.

Cependant, dans la majorité des cas, la maladie de Parkinson continue d’évoluer avec les années. De nouveaux symptômes apparaissent, témoins de la progression de la maladie vers d’autres systèmes neuronaux, les rendant résistants au traitement médical et chirurgical. A ce stade, les patients présentent des troubles de la marche et de l’équilibre, des chutes, et un déclin cognitif. Le handicap est alors majeur et aucun traitement efficace n’est encore disponible.

Actuellement, les centres de recherche sur la maladie de Parkinson enregistrent l’activité du noyau subthalamique via les électrodes de stimulation cérébrale profonde, pour pouvoir améliorer cette thérapie chirurgicale et l’adapter selon les symptômes et la sévérité propres à chaque patient parkinsonien.

Evinaa, de BrainWhy

Sources

[1] Agid Y, Ruberg M, Javoy-Agid F, et al. Are dopaminergic neurons selectively vulnerable to Parkinson’s disease? Adv Neurol. 1993;60:148-64. Available at: http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8420132. Accessed June 13, 2014.

[2] Benabid AL, Pollak P, Louveau A, Henry S, de Rougemont J. Combined (thalamotomy and stimulation) stereotactic surgery of the VIM thalamic nucleus for bilateral Parkinson disease. Appl Neurophysiol. 1987;50(1-6):344-6.

[3] WHITTIER JR, METTLER FA. Studies on the subthalamus of the rhesus monkey; anatomy and fiber connections of the subthalamic nucleus of Luys. J Comp Neurol. 1949;90(3):281-317.

[4] The subthalamic nucleus , hemiballismus and Parkinson ’ s disease : reappraisal of a neurosurgical dogma. 2001:5-19

[5] Limousin P, Krack P, Pollak P, et al. Electrical stimulation of the subthalamic nucleus in advanced Parkinson’s disease. N Engl J Med. 1998;339(16):1105-11. doi:10.1056/NEJM199810153391603.

Pour aller plus loin

Association de la maladie de Parkinson, créée en 1984 par le Professeur Yves Agid : http://www.franceparkinson.fr/

Atteint de la maladie de Parkinson, l’acteur Michael J.Fox (Retour vers le futur) a créée en 2000, la fondation Micheal J.Fox dont le but est de financer des projets de recherche sur la maladie de Parkinson : https://www.michaeljfox.org/

Centre de recherche dédié aux maladies neurodégénératives et psychiatriques, fondée en 2005 qui héberge depuis 2010, sur le site de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, un centre de recherches animé par 600 chercheurs, ingénieurs, et techniciens : http://www.icm-institute.org/

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